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C'era una volta il West (Il était une fois dans l'ouest)

14 Février 2014, 15:55

Pour le 100ème article de ce blog, je me devais de marquer le coup avec un film d'exception... 

(1968, de Sergio Leone)

(1968, de Sergio Leone)

Un mystérieux joueur d'harmonica descend du train dans une petite ville de l'ouest. Il est attendu sur le quai par trois hommes, qui sont en fait là pour l'abattre...

 

Les traductions anglaise et française du titre sont trompeuses : Leone ne raconte pas une histoire dans l'ouest, mais l'ouest lui-même ("Il était une fois l'ouest"). Nous sommes au crépuscule du far-west sauvage face à l'avancée de la civilisation. C'est en quelque sorte le thème de tous les grands westerns, dont le réalisateur veut faire la synthèse. Incarnations de ce monde qui disparait, Harmonica, Cheyenne et Frank appartiennent à une race en voie d'extinction : sauvages, individualistes et sans scrupules, ils n'ont pas leur place dans le monde qui s'annonce. Eux sont faits pour vivre dans ce désert poussiéreux, desséché et fantomatique (Harmonica n'a d'ailleurs pas de nom et, selon certaines lectures du film, serait en fait un revenant vengeur). 

 

La dernière fois que j'ai revu ce film, j'ai surtout été marqué par l'importance de la soif : les personnages sont tous assoiffés, d'eau, de café, d'amour pour Cheyenne, d'espoir pour Jill. La propriété de Sweetwater ("eau douce"), dont hérite cette dernière symbolise tout cela. C'est la terre promise biblique et l'eau distribuée aux ouvriers représente celle nouvelle vie. 

C'era una volta il West (Il était une fois dans l'ouest)

Leone compile tous les moments "mythologiques" des grands westerns, comme si cela devait être le dernier conte sur le far-west, le chant du cygne du genre. Il veut faire une démonstration de virtuosité : ainsi commence-t-il par une reprise de la scène qui termine High Noon (Le train sifflera trois fois), comme pour montrer que lui est capable de démarrer au niveau où les autres s'arrêtent.

Le coup de force de Leone est même encore plus étonnant : il commen par ce qui est habituellement la scène finale, le duel ! Et le héros se fait apparemment tuer -comme si le film était déjà terminé au bout de dix minutes ! Cette démonstration d'audace nous montre sa volonté de propulser son oeuvre au rang de western total, celui qui vaudra pour tous les autres et qu'on ne pourra plus égaler. C'est aussi l'invention d'un tournant du genre dans l'amoralité la plus complète : il n'y a plus de conflit entre le bien et le mal, plus de braves gens contre des criminels, juste des tueurs mus par le désir de vengeance. Le western humaniste est bien mort.

A la place, Leone nous propose l'épopée des sauvages qui résistent à la civilisation. Toute l'oeuvre de Leone tend en effet vers une histoire des Etats-Unis, du point de vue de ses rebuts et de ses criminels (les tueurs dans ce film, les révolutionnaires dans Giù la testa, les truands dans Il était une fois l'Amérique). En voyant les trois "Il était une fois" à la suite, on assisterait au déroulement d'une seule grande fresque en plusieurs chapitres, un seul opéra, car l'ambition de Leone, comme de tous les grands, est de recouvrir leur époque par leur oeuvre, d'y rejouer le monde entier à leur façon. Sur la scène de cet opéra, ce ne sont plus les nobles qui s'affrontent, mais des parias, des individus irrécupérables pour l'ordre social, qui n'ont aucune place dans le monde de demain.

 

C'est pour cette raison qu'Il était une fois dans l'ouest est un western fait comme un opéra - et un opéra qui ressemble à un requiem. 

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commentaires
D
Ce qui est extrêmement frappant dans ce film, c'est la jubilation qu'on ressent en le regardant. L'alchimie est parfaite entre les thèmes que tu décris si bien et qui donne la si grande importance à ce film et des scènes absolument mythiques, où il tourne la scène comme tu souhaiterais qu'elle soit jouée ( par exemple la première scène avec cheyenne : Le thème mythique d'harmonica explose au moment où la lumière jetée par Cheyenne éclaire Harmonica) . Juste jubilatoire.
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