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Interstellar

21 Décembre 2014, 11:36 Boucles temporelles

(2014, de Christopher Nolan)

(2014, de Christopher Nolan)

Dans un avenir proche, l'humanité est menacée par la disparition des cultures et la raréfaction de l'oxygène. La NASA entrevoit un espoir de survie pour notre espèce dans la colonisation de planètes d'une autre galaxie, devenues accessibles depuis l'apparition d'un mystérieux passage spatial près de Saturne...

 

Avec ce nouveau film, encore plus ambitieux que ses précédents, Christopher Nolan nous raconte comment des événements dramatiques aux confins de l'univers vont influer sur le destin de l'humanité ici-bas. Nous découvrons d'abord une Terre inhospitalière, puis nous décollons presque d'un coup dans l'espace, pour partir aux confins de l'univers. On ne cessera alors d'en prendre plein la vue : trou de ver, planètes à la physique incroyable, trou noir et plus encore...

 

Mais si Interstellar est une réussite, c'est avant tout parce que le réalisateur a su se défaire de ses défauts récurrents, dont le plus gros, celui du montage frénétique qui rendait parfois illisibles des séquences entières de The Dark Knight. Il développe plus de scènes d'expositions et introduit plus de variété dans le rythme de l'histoire, de sorte qu'on a moins cette impression pénible d'assister à une longue bande-annonce. Nolan aurait pu faire encore plus de coupes dans les dialogues et laisser les images raconter par elles-mêmes, mais en l'état, son film est déjà bien supérieur à ses derniers. (Ne poussons pas le "kubrickisme" trop loin non plus...)

Du même coup, Nolan laisse plus de place à l'émotion qu'à l'habitude. Il n'a pas fait une oeuvre seulement cérébrale et très efficace, mais a su mettre en scène une grande aventure humaine. Il a compris que la sincérité des sentiments a plus de valeur, même dans une oeuvre de science-fiction, que le "réalisme" scientifique, si pointu soit-il.

Interstellar

Et c'est pourquoi Interstellar échappe à la surenchère. En effet, dans ce film, plus que les voyages aux confins de l'univers, ce qui compte est l'attachement de l'homme à sa planète et d'un père à sa famille. Comme le dit bien cette critique sur Chronic'art : "en dépit d’allers-retours aux confins de l’univers et d’un monde au bord de l’agonie, la vie y demeure une simple tragédie du temps qui passe, scandée par les promesses non tenues et les rendez-vous manqués". Et Nolan nous montre aussi que, même dans une autre galaxie, les hommes sont toujours les mêmes, avec leur héroïsmes et leurs faiblesses. La séquence la plus réussie dramatiquement me semble être celle de la planète de glace, pour cette raison. Cela prouve, une fois de plus, que la bonne science-fiction met la technologie imaginaire au service de problèmes humains, et pas l'inverse, c'est à dire qu'elle met l'homme au centre de son récit.

Pour ce qui est de la musique, Hans Zimmer a su lui aussi se réinventer, en nous épargnant les batteries assommantes et les lancinants violons qui avaient fini par nous lasser depuis Inception et la trilogie Batman.

Avec Interstellar, Nolan donne un nouveau tournant à son oeuvre. S'il n'est pas encore au niveau des plus grands maîtres du cinéma, il a su se défaire de plusieurs tics et manies qui empêchaient jusqu'ici son art de s'exprimer pleinement. On pouvait difficilement rêver mieux pour une odyssée de l'espace en 2014.

Interstellar

Visuellement, c'est bien sûr le trou noir géant qui est la "vedette" de ce film, et qui en restera certainement le symbole, comme les monolithes pour 2001. Pour la première fois, on peut voir sur grand écran un trou noir très réaliste, avec son disque d'accrétion autour de lui, composé de photons en rotation rapide. On observe simultanément un dédoublement de cette lumière en raison d'un effet dit de "lentille gravitationnelle" (gravitational lensing), déformation de l'espace due à la densité extrême du trou noir. On voit donc à la fois le disque lumineux selon un plan horizontal et aussi sur un plan vertical. 

Pour plus de précisions sur la physique des trous noirs, on peut se renseigner sur le blog de Jean-Pierre Luminet, qui note quelques imprécisions dans le film, malgré la participation de l'astrophysicien Kip Thorne au projet (on sent du reste Luminet un peu jaloux du succès de ce dernier..). Cette représentation d'un trou noir parfaitement symétrique reste une vue d'artiste. En réalité, comme le montre Luminet, un tel phénomène présenterait une luminosité inégale selon la distance au centre de gravité. 

(blog de Jean-Pierre Luminet)

(blog de Jean-Pierre Luminet)

Interstellar offre donc un bel exemple de rencontre entre art et science, mais c'est tout de même l'art qui prend le dessus : Nolan n'a pas voulu faire un documentaire sur les phénomènes stellaires.

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