[JV] Quantum Break

(2016, de Remedy Entertainment)

Paul Serene a fondé la société Monarch pour construire une machine à voyager dans le temps, avec l'aide de William Joyce. Le frère de ce dernier, Jack Joyce, assiste à la mise en route de la machine. Mais un accident catastrophique irradie Paul et Jack de chronons, des particules qui vont leur donner des capacités de manipulation du temps. Peu après, Paul abat William. Vous incarnez Jack, qui va tout faire pour arrêter Paul Serene, dont la machine menace de détruire l'univers. Face à vous se dressent les forces paramilitaires de Monarch, armées et équipées d'armures pour résister aux perturbations temporelles.

Quantum Break est un FPS dont l'idée de départ est originale. Grâce à ses pouvoirs temporels, Jack peut créer une bulle autour de lui pour ralentir les ennemis, ou empêcher une porte de se refermer trop vite. Il va traverser des zones où le temps s'est arrêté et où l'espace est brisé, ce qui lui permettra par exemple de traverser un pont métallique en train de s'effondrer, en sautant d'un morceau de métal en suspension à un autre. 

Amené à voyager entre trois époques (1999, 2010 et 2016), le héros croit encore pouvoir empêcher l'effondrement du temps, alors que Paul Serene est persuadé qu'on ne peut rien y changer. Éternel dilemme des voyages temporels : revenir dans le passé peut-il modifier le présent, comme dans Retour vers le futur, ou bien (solution déterministe) le présent et l'avenir tiennent-ils déjà compte des retours vers le passé ?

Après un bon début, l'intrigue et l'action se mettent à patauger dans l'acte 3. On peine à suivre les péripéties et à comprendre les intentions exactes de Serene. Il a vu la fin du temps et semble vouloir construire une capsule pour s'en protéger. Mais comment compte-t-il survivre si le monde entier s'effondre physiquement ? On en vient à regretter l'absence de la scène habituelle où le méchant va tuer le héros - non sans lui avoir auparavant expliqué son plan machiavélique.

Le jeu se vante de contenir énormément d'informations optionnelles à découvrir sur des mémos, des mails, des télévisions etc. En lisant des discussions entre les membres de Monarch, on s'aperçoit que la moitié des responsables de l'entreprise sont des traîtres. Tout cela semble intéressant à creuser, mais le problème (qui n'est pas que dans ce jeu*) est que ces informations ne sont pas intégrées dans l'histoire principale. Cela oblige à s'arrêter à chaque pièce pour lire des mails longs comme un jour sans pain. Or, un jeu vidéo n'est pas un roman : il n'est pas fait pour scroller des colonnes et des colonnes de texte, il est fait pour jouer !

Les concepteurs de Quantum Break se sont dispersés dans ce contenu secondaire, au détriment de la clarté de l'intrigue principale. De plus, ils ont fait le choix étrange de proposer des séquences filmées avec de vrais acteurs, disponibles à l'époque (2016) sur une plate-forme de streaming. Ces vidéos n'étant plus disponibles, il faut aller sur YouTube pour les voir. C'est tout sauf pratique. Qui plus est, ces bouts de films mettent en scène des personnages secondaires sans nous éclairer sur l'intrigue principale.

Hélas, les dialogues ne font guère avancer l'intrigue et la plupart du temps, il faudra se contenter de répliques toutes faites telles que : "Fais-moi confiance. Dépêchez-vous. Il faut le sauver. C'est urgent. On n'a plus le choix. On a toujours le choix. Vite, ça va exploser" etc. Le jeu tire en longueur en dédoublant des scènes d'actions. Par exemple à l'acte 3, vous abattez tout un régiment de chrono-soldats dans un parking, puis vous entrez dans le poste de sécurité et quand vous ressortez, vous allez devoir abattre autant d'ennemis qu'à l'aller pour retraverser le parking dans l'autre sens. A l'acte 5, la cheffe de la sécurité lance à ses hommes :  « Il semble que Jack Joyce soit plus dangereux que prévu. »
Elle a mis quatre actes à s'en rendre compte, quatre actes pendant lesquels on a abattu des dizaines de ses hommes... « Désormais, mettez-tout en l'œuvre pour l'arrêter ! » Oui, il serait temps !

Quantum Break est un jeu original et sympathique à jouer, mais, un peu comme Tenet de Nolan, sorti 4 ans après et auquel il fait penser, il a le défaut de se perdre dans les méandres d'un scénario mélangeant paradoxes complexes et scènes d'action. Cela donne des productions qui, malgré des qualités, manquent de charme et se croient trop intelligentes pour ce qu'elles sont.
 

Et ce sont souvent des choses qui nous ont déçus, parce qu'elles sont passées près d'être très bien, dont on parle le plus longuement.

* Le pire coupable de ce défaut est Disco Elysium.