[JV] Detroit: Become Human

(2018, de Quantic Dream)

En 2038, la société Cyberlife détient le marché mondial de la création d'androïdes, conçus pour toutes les tâches dont les hommes ne veulent plus : ouvriers, livreurs, agents de sécurité, prostituées...

Les destins de trois de ces androïds vont se croiser dans la ville de Detroit : Markus, un assistant de vie au service d'un vieux peintre très riche ; Kara la garde d'enfant d'une fillette dont le père, alcoolique et violent avec des faux airs de Michael Madsen, la maltraite fréquemment ; Connor, un négociateur et enquêteur au service de Cyberlife. On incarnera tour à tour ces trois personnages, dans une histoire qui mettra en question la survie des androïdes et nous obligera à décider s'ils sont ou non des êtres intelligents. Les androïdes deviendront-ils des humains à part entière ? Les hommes se mettront-ils à les traiter de façon plus humaine ?

La première chose qui saute aux yeux est la modélisation des visages, bluffants. On est proches de la perfection. De même que dans l'univers du jeu, on ne peut distinguer à l'oeil nu un androïd d'un humain, de même en tant que joueur, on a du mal parfois à discerner un visage de synthèse de celui d'un acteur en chair et en os. Si certains personnages d'une scène sont moins réussis, les héros et les personnages secondaires sont à s'y tromper. 

Le jeu propose une intrigue histoire guidée, en plusieurs chapitres, mais avec des choix souvent cruciaux, qui peuvent réellement changer la suite des événements. En fin de chapitre, on peut d'ailleurs avoir un aperçu de l'arbre narratif, avec toutes les autres branches de l'histoire -et elles sont souvent nombreuses ! 

Cependant, le réalisme dans l'imitation ne suffirait pas à rendre les personnages attachants, puisque -pour prendre un univers similaire- on s'attache tout autant aux héros de Technobabylon, qui sont en rétro pixel art.

L'autre réussite du studio Quantic Dream est d'avoir créé une histoire vraiment prenante, avec 90% de réalisme et juste 10% de science-fiction, un mélange parfait qui nous met dans la peau d'androïdes qui vont devoir prendre des décisions et assumer leurs erreurs, comme les êtres humains. L'univers fait penser à Blade Runner 2049, mais plus encore à Ex Machina, pour le côté "SF réaliste".

Le plus réussi des trois héros est peut-être Connor, avec ses faux airs de Christian Slater jeune : on peut jouer ce négociateur de Cyberlife soit en restant fidèle à l'entreprise qui l'a créé, soit en l'amenant à basculer dans une révolte contre le système. Le chapitre d'introduction va nous placer d'emblée face à un androïde qui, se sentant trahi, a assassiné la famille où il travaillait et pris en otage la fille. Connor va devoir réunir dans l'urgence des indices et aller négocier avec le preneur d'otages : pour le décider à se rendre ou pour laisser le temps aux snipers de l'abattre ?

L'histoire est riche et bien menée. On n'échappe cependant pas à certains clichés, qui semblent increvables : ainsi, Connor devra faire équipe avec Hank, un officier de police qui, comme des milliers d'autres avant lui depuis les années 80, est 1) vétéran 2) blasé 3) alcoolique ; qui de plus 4) aime mieux se fier à son flair qu'à la technologie et qui bien sûr a un 5) supérieur Noir et corpulent qui 6) menacera de lui retirer son badge, et enfin, il sera confronté à un 7) connard du FBI qui viendra marcher sur ses plate-bandes. 

Au total, Detroit: Become Human est une très grande réussite, même si quelques QTE (Quick Time Events) sont de vrais punitions pour des joueurs comme moi, pas habitués aux manette de console qui peinent déjà à trouver le rond ou le carré, pour ne pas parler de L1 ou R2 ! Or, ces séquences de réactions pourront être déterminantes à plusieurs moments, pour savoir si un suspect s'enfuit ou si un des héros survit... 

Mais la plupart des embranchements de l'histoire seront décidés par des dialogues où il faudra donner des réponses, parfois en temps limité, parfois même très limité ! On pourra même interagir avec Chloé, l'hôtesse de l'écran d'introduction du jeu, qui à l'occasion, viendra discuter avant qu'on lance le jeu. C'est dire si Quantic Dream a poussé loin la confusion entre fiction et réalité, et voulu nous bluffer avec sa technologie !