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Dernier domicile connu

20 Août 2023, 22:23 Police partout justice nulle part

(1970, de José Giovanni)

(1970, de José Giovanni)

Policier aux états de service impeccables, mais aux méthodes musclées, Marceau Léonetti vient de recevoir la Légion d'Honneur. Un jour qu'il rentre chez lui après une longue enquête, il doit arrêter une voiture dont le conducteur est complètement ivre : il s'amuse à faire des tours de rond-point, les portes papillon grand ouvertes. Le jeune homme, fils d'un célèbre avocat, menace Léonetti de représailles.

 

Peu après, le directeur de la police judiciaire reçoit un rapport de l'avocat, qui accable Léonetti et l'accuse d'être un danger pour la société. Le directeur n'a d'autre choix que de muter son inspecteur dans un petit commissariat du XVIIIe. Léonetti se retrouve chargé de traquer des pervers sexuels qui s'en prennent aux femmes dans les cinémas des environs. Une femme policière inexpérimentée, Jeanne Dumas, va servir d'appât. 

Peu après, un collègue de Léonetti, à la tête d'une brigade auxiliaire, le contacte pour retrouver un comptable, Martin, témoin clef dans le procès d'un célèbre truand qui doit se tenir dans huit jours. Aucun policier n'est parvenu à retrouver Martin, mais l'acharnement de Léonetti est légendaire parmi les flics. Accompagné de Jeanne, Léonetti se met donc sur la trace du disparu. Leur enquête commence au domicile présumé du comptable, dans le XIIIe, dans une des grandes tours de la cité Glacière.

 

Le buddy movie est un genre qui a fait florès à partir des années 80 : il met en scène deux policiers que tout oppose, le jeune et le vieux, le naïf et le blasé. On peut penser à 48 Hours, aux Ripoux, à l'Arme Fatale... L'inventeur du genre est peut-être Kurosawa dans Chien enragé (1949). Dans Dernier domicile connu, Lino Ventura et Marlène Jobert forment un très beau duo : la timide et maladroite Jeanne va peu à peu s'affirmer et faire profiter l'ancien, Léonetti, de son intelligence et de son énergie. Face à eux, Michel Constantin, avec sa mâchoire de gorille et ses grosses oreilles, campe un bandit redoutable. 

 

Le film, vers le milieu, suit l'enquête inlassable des deux policiers, qui traversent tout Paris, interrogeant toutes sortes de gens, une voisine langue de vipère, l'institutrice de la fille de Martin, des commerçants, au cours d'une exploration qui vire au clip urbain, avec ses enseignes au néon jusqu'à en donner le tournis. Le plan le plus surprenant du film est celui où les deux héros poussent la porte d'un immeuble et se retrouvent dans un immense terrain vague, où la façade qu'ils viennent de franchir tient à peine debout.

 

Le film nous montre l'irruption de la modernité dans le Paris d'antan. Dans ce monde, les gens vivent comme des fourmis dans leurs barres de béton et ne connaissent plus leur voisin. Les rêveurs n'ont plus leur place dans une société vouée à l'efficacité. Même les policiers servent une machine dont ils ne comprennent pas tous les tenants et aboutissants. Des thématiques qui rappellent les films de Tati : la froide et grise cité Glacière s'intégrerait très bien aux décors de Playtime. Dernier domicile connu est une oeuvre intéressante, où le réalisme approche plusieurs fois de l'hallucinatoire et du cauchemar.

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